Réussir son implantation au Maroc

Janvier 2025Le Maroc, situé à la croisée de l’Afrique, de l’Europe et du Moyen-Orient, s’est affirmé comme l’une des destinations de choix pour les investissements étrangers en Afrique. Grâce à sa stabilité politique, son infrastructure et arsenal juridique modernes, le Maroc se positionne en tant que hub stratégique pour les entreprises du monde entier souhaitant investir et s’implanter sur le continent africain.


En effet, en tant que carrefour géographique, le Maroc offre un accès privilégié aux marchés africains en croissance rapide. Les investissements réalisés au Maroc peuvent servir de base pour étendre les activités vers d’autres pays africains.
Le choix de s’implanter au Maroc constitue ainsi une réelle opportunité pour les différents acteurs économiques, ce pourquoi il est nécessaire de faire un tour d’horizon des enjeux juridiques y afférents.


Dans cet article, nous vous proposons de plonger dans l’univers de l’implantation au Maroc à travers une vue d’ensemble des différents aspects juridiques à prendre en considération en amont de tout investissement.
Comme explicite ci-après, il est impératif pour tout investisseur étranger d’entreprendre une analyse approfondie sur le plan juridique pour une préparation optimale de son implantation. Dans ce cadre, plusieurs aspects cruciaux doivent être pris en compte.

  1. Le choix de la forme sociale

Le droit marocain offre une variété de formes sociales comparables à celles du droit français. Parmi les options possibles, l’on retrouve la société anonyme (SA), la société par actions simplifiée (SAS), la société à responsabilité limitée (SARL), la société en nom collectif (SNC), la société en commandite simple (SCS) et la société en commandite par actions (SCA).


Cette similitude avec le droit français facilite le processus de création des sociétés notamment pour les investisseurs français qui souhaitent s’établir au Maroc, à travers un cadre juridique familier et transparent.


En pratique, deux options sont le plus souvent usitées en ce qui concerne l’implantation d’un opérateur économique au Maroc : la SA et la SAS.
La SA a une gouvernance codifiée, le seul choix offert à l’investisseur étant entre la forme moniste (conseil d’administration) ou dualiste (conseil de surveillance – directoire). Un capital social minimum de 300 000 dirhams est aussi requis pour constituer une SA. Elle se distingue néanmoins par la possibilité de procéder à un appel public à l’épargne.


A l’inverse, la SAS se caractérise par une plus grande souplesse, que ce soit, justement, sur son mode de gouvernance (seule est obligatoire la nomination d’un président), sur les règles statutaires régissant le transfert des titres sociaux ou sur la fixation du montant de son capital social. Elle ne peut néanmoins pas procéder à un appel public à l’épargne. Aussi, contrairement à la SA, il n’est pas obligatoire de nommer un commissaire aux comptes (sauf atteinte d’un seuil règlementaire, lequel n’est pas encore paru à date).


La SAS est une forme sociale particulièrement prisée au Maroc, en raison de sa souplesse et de ses nombreux avantages. A l’instar du droit français, la SAS offre une grande flexibilité dans la rédaction des statuts, permettant ainsi aux associés de définir librement les règles de fonctionnement et le mode de gouvernance de la société. En raison de sa flexibilité, la SAS est fortement recommandée pour les investisseurs cherchant une solution adaptée et efficiente pour leur implantation au Maroc.

  1. La réglementation des changes marocain

Nous nous intéresserons spécifiquement au régime dit de « convertibilité » en raison de son caractère essentiel dans le cadre des projets d’investissements au Maroc. Etant une spécificité locale, cette composante est bien souvent ignorée par les investisseurs étrangers, lesquels peuvent rencontrer a posteriori des difficultés en vue du transfert des fonds de la filiale marocaine vers la société mère située à l’étranger en cas de non-respect des dispositions applicables en la matière.
Au sens des dispositions de l’article 155 de l’instruction générale des opérations de changes en date du 2 janvier 2024 (ci-après l’« Instruction »), la création d’une société, notamment, constitue un investissement étranger.
A ce titre, l’Instruction a instauré un régime de convertibilité applicable à ces investissements, lequel garantit aux investisseurs l’entière liberté (i.e. : sans accord préalable de l’Office des Changes) pour :

  • la réalisation des opérations d’investissement au Maroc ;
  • le transfert des bénéfices produits par ces investissements ; et
  • le rapatriement du produit de liquidation ou de cession des investissements.

Pour bénéficier du régime de convertibilité, l’investissement doit être financé en devises et non en dirhams, sans quoi aucune des opérations susvisées ne pourra être réalisée sans l’accord préalable de l’Office des Changes, ce qui est en pratique très contraignant.
Par ailleurs, bien que l’Instruction ne mentionne désormais plus l’obligation liée à l’établissement d’un compte-rendu d’investissement, il est toutefois recommandé d’adresser un courrier à l’Office des Changes accompagné notamment du formulaire bancaire intitulé « formule 2 » délivré par la banque réceptrice des fonds en devises au titre de l’investissement initial. Cela permet en effet à l’investisseur de conserver une trace des modalités de son investissement et de constituer un dossier « investisseur étranger » auprès de l’Office des Changes.
En outre, l’assistance technique apportée aux filiales implantées au Maroc par les sociétés du groupe établies à l’étranger est également réglementée par l’Instruction. A ce titre, l’article 56 de l’Instruction pose notamment un principe dit de « dégressivité », selon lequel les redevances perçues en contrepartie de ces prestations doivent s’inscrire dans le sens d’une dégressivité pour tenir compte de l’autonomie acquise au fil des ans par la filiale.
En d’autres termes, les redevances perçues par la société-mère en contrepartie de l’assistance technique au profit de la filiale marocaine devront décroître progressivement au fil des années, jusqu’à disparaitre in fine. En ce sens, le contrat d’assistance technique devra prévoir expressément ce principe, à l’effet de se prémunir contre tout risque lié à un éventuel redressement à ce titre en cas de contrôle inopiné réalisé par l’Office des changes.

  1. Les flux transfrontaliers

En ce qui concerne le régime fiscal applicable aux flux transfrontaliers entre le Maroc et d’autres pays, il est nécessaire de vérifier l’existence de conventions fiscales bilatérales, visant à éviter la double imposition des revenus.
En ce sens, le Maroc a notamment signé des conventions fiscales avec un nombre important de pays abritant des investisseurs majeurs parmi lesquels l’Allemagne, les Emirats Arabes Unis, les Etats-Unis, la France ou encore l’Italie. Ces accords bilatéraux visent à éviter une double imposition dans les deux pays concernés.
Néanmoins, en pratique, l’administration fiscale marocaine tend à appliquer une retenue à la source sur certains revenus à des filiales marocaines (e.g. les services techniques), en appliquant à la lettre le Code général des impôts au mépris de conventions fiscales bilatérales qui excluent ces impositions.

Quelques dispositifs incitatifs à l’investissement

Le Maroc a mis en place plusieurs fonds souverains sectoriels qui peuvent fournir une aide considérable en termes d’investissement. On peut penser particulièrement au Fonds de développement industriel et des investissements, au Fonds de développement agricole et au Fonds Hassan II pour le développement économique et social.


L’investisseur peut également bénéficier d’une convention d’investissement, telle que prévue par la Charte de l’Investissement. Cette convention doit être signée avec l’Etat marocain et être approuvée par la Commission des investissements. Le projet considéré doit remplir des critères relatifs, entre autres, au montant de l’investissement, à la création d’emploi, à la localisation du projet et au transfert de technologie qu’il opère. Cette convention peut permettre, inter alia, l’octroi d’avantages financiers relatifs à la réalisation de l’investissement et à la formation professionnelle.
Dans le même sens, le statut « Casablanca Finance City » est un statut ouvert notamment aux entreprises financières et à celles opérant des activités connexes qui sont installées dans la zone « Casablanca Finance City ». L’obtention de ce statut, conditionnée au respect des critères d’éligibilité requis à analyser au cas par cas, permet notamment à la filiale de bénéficier d’exonérations fiscales et sociales subséquentes.
Il existe également des zones franches d’exportation dénommées « zones d’accélération industrielle » (ZAI), qui sont des espaces déterminés du territoire douanier où sont autorisées, en dispense de la réglementation douanière, du contrôle du commerce extérieur et des changes, toutes activités exportatrices à vocation industrielle ou commerciale, ainsi que les activités de services liées. Chaque zone est créée et délimitée par un décret qui fixe la nature et les activités des entreprises pouvant s’y implanter. Sous réserve du respect des critères d’éligibilité, les entreprises qui s’installent dans ces ZAI peuvent bénéficier d’un régime de faveur, notamment en matière de contrôle du commerce extérieur et des changes et de régime fiscal.

Enfin, l’on peut citer l’offshoring, dispositif ouvert aux sociétés exerçant une activité relevant de filières déterminées, réalisant un chiffre d’affaires important à l’export et employant un certain nombre de salariés, étant précisé qu’une distinction est faite entre les sociétés installées dans les Plateformes Industrielles Intégrées (P2I) et celles en dehors de ces zones. Celui-ci permet, en cas de respect des critères requis, l’obtention par les sociétés éligibles d’avantages essentiellement de nature fiscale ainsi qu’en termes de formation professionnelle.

En conclusion, le droit marocain, grâce notamment à sa politique d’ouverture aux investissements, est propice à l’installation d’acteurs économiques étrangers en raison des multiples dispositifs de faveur qui ont été mis en place à cette fin.

Nous vous invitons a consulter UGGC Africa pour tous vos projets d’implantations au Maroc.

Article rédigé par Rim Tazi, consultante et Ali Bougrine, managing partner chez UGGC Africa

vue de Casablanca Finance City