Avril 2024 – Le franc CFA, abréviation de “Communauté Financière Africaine”, est une devise qui a été créé en 1945 pour remplacer le franc français dans quatorze pays d’Afrique de l’Ouest et centrale. Il est géré par deux banques centrales : la Banque des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) pour les pays de l’UEMOA (Union Économique et Monétaire Ouest Africaine) et la Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC) pour les pays de la CEMAC (Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale).
D’un point de vue juridique, le franc CFA est régi par des accords bilatéraux entre les pays africains concernés et la France. Ces accords fixent notamment les modalités de garantie de la parité fixe entre le franc CFA et l’euro (1 € = 656,51 FCFA), les mécanismes de gestion et de régulation de la monnaie ainsi que le dépôt de 50 % des réserves de change auprès du Trésor français.
Cependant, le franc CFA a été sujet à des controverses et à des critiques qui se sont accentuées au fil des décennies, étant perçu par certains comme un symbole de la dépendance économique des pays africains vis-à-vis de la France et du manque de souveraineté économique des pays africains. Les partisans de cette critique soulignent que la politique monétaire de la zone franc est largement contrôlée par la France, notamment à travers la garantie de la parité fixe avec l’euro.
Ces critiques ont alimenté des appels à la réforme du franc CFA, voire à son abolition. En décembre 2019, les présidents de la Côte d’Ivoire et de la France ont annoncé un accord pour réformer le franc CFA et le renommer en “Eco”, tout en mettant fin à la centralisation des réserves de change auprès du Trésor français et en supprimant les sièges accordés à la France au sein de la BCEAO.
Ces annonces ont suscité des réactions mitigées au sein des pays concernés, certains saluant le changement comme une étape vers une plus grande autonomie économique, tandis que d’autres restent sceptiques quant à la portée réelle de ces modifications sur le système monétaire et financier en Afrique (dénonçant par exemple le maintien de la garantie de la parité fixe avec l’euro).
Cette réforme du franc CFA n’a pas encore été réalisée et certains pays de la CEMAC n’y ont pas adhéré, ce qui a suscité des doutes quant à sa viabilité à long terme, de sorte que la question du franc CFA demeure un sujet de débat animé en Afrique. Les opinions divergent sur la meilleure façon de réformer le système monétaire et financier pour promouvoir le développement économique et la souveraineté des pays africains.
Le Burkina Faso, le Niger et le Mali ont affiché leur volonté de ne plus utiliser le franc CFA ces dernières années, afin de préserver leur souveraineté. Récemment, c’est le président nouvellement élu du Sénégal, Bassirou Diomaye Faye, qui a fait de l’arrêt de l’utilisation du franc CFA au Sénégal l’un de ses thèmes de campagne, mettant en avant l’idée d’une monnaie unique pour les membres de la CEDEAO ou d’une monnaie sénégalaise nationale propre.
Les perspectives de réformes futures restent donc incertaines et sujettes à des négociations complexes entre les pays africains, l’objectif étant de défendre la souveraineté économique monétaire des états africains tout en préservant la confiance des investisseurs. En tout état de cause, il est certain que le franc CFA dans sa configuration actuelle a nécessairement vocation à évoluer.
Rédigé par Ali Bougrine, Managing Partner d’UGGC Africa, et Victor Arnould, Collaborateur d’UGGC Avocats et du Desk Afrique.