Juillet 2025 – Le Protocole sur l’Investissement de la Zone de Libre-Échange Continentale Africaine (ZLECAf), adopté en février 2023, a marquée une étape décisive dans l’intégration juridique et économique du continent africain. Il s’inscrit dans la continuité des objectifs fixés par l’Union Africaine, visant à faciliter les investissements intra-africains et à promouvoir un développement durable et inclusif. Inspiré directement des principes énoncés dans le Code Panafricain d’Investissements (CPI) de 2016, le Protocole ZLECAf en concrétise les orientations dans un instrument contraignant. On y retrouve les fondements d’un investissement responsable, encadré juridiquement, dans un cadre continental unifié. Le lien entre les deux textes illustre une filiation normative assumée, transformant un corpus de principes en obligations effectives. Le Protocole vise notamment à résoudre les difficultés posées par la coexistence de nombreux traités bilatéraux d’investissement (TBI) entre pays africains. Ainsi, il prévoit explicitement la résiliation progressive de ces TBI intra-africains (article 2), afin d’éliminer les contradictions juridiques et les incertitudes qui freinent les flux d’investissement. L’article 5 consacre un mécanisme d’alignement des politiques nationales sur les objectifs continentaux. Le texte impose des obligations substantielles aux investisseurs (articles 14 à 18), notamment en matière de transparence, de conformité sociale et environnementale, et de lutte contre la corruption. Il renforce également les critères d’éligibilité à la protection du traité, limitant les pratiques abusives de « treaty shopping » ou d’investissement opportuniste sans substance économique. L’article 10 réaffirme avec clarté le droit des États à réguler leurs politiques dans l’intérêt public. Ce principe de souveraineté régulatrice est au cœur de l’équilibre recherché entre attractivité de l’environnement des affaires et défense des objectifs stratégiques nationaux. Il permet aux États de légitimer des mesures d’ordre public sans craindre de sanctions excessives et s’exposer à des contentieux arbitraux CIRDI. Du point de vue opérationnel, le mécanisme de règlement des différends prévoit une hiérarchie claire entre médiation, négociation et arbitrage (articles 20 à 25), et favorise les solutions endogènes via les institutions judiciaires africaines. Ce schéma vise à limiter la dépendance à l’arbitrage international et à renforcer l’intégration institutionnelle du continent. Les implications pratiques pour les investisseurs sont nombreuses. Ceux-ci devront adapter leurs pratiques contractuelles et organisationnelles, intégrer des clauses ESG robustes dans leurs projets, et démontrer un ancrage économique réel pour bénéficier du cadre de protection. Cela crée un filtre qualitatif destiné à encourager un investissement structurant, aligné sur les priorités africaines. La mise en œuvre du Protocole demeure néanmoins un défi. Elle repose sur la volonté des États de ratifier, transposer et faire respecter ces normes. Les capacités administratives, les convergences juridiques régionales et les mécanismes de suivi joueront un rôle clé dans son effectivité à moyen terme. Le Protocole ZLECAf représente ainsi un socle de convergence pour les politiques d’investissement africaines. Il témoigne de la volonté des États africains de penser ensemble leur souveraineté économique, au service d’une croissance plus inclusive et durable. |
